L’exposition collective « Il n’existe aucune chose telle qu’une chose, il n’y a que des systèmes » tire son titre du célèbre roman d’anticipation utopique d’Ernest Callenbach, Écotopia, publié en 1975. Ce dernier, qui demeure d’une pertinence saisissante, dresse le portrait minutieux d’une société radicalement écologique. En Écotopia — ainsi qu’est nommée la nation fantasmée —, la transformation profonde des systèmes socio-économiques a permis l’établissement de pratiques alternatives, à la fois justes et respectueuses des écosystèmes naturels. L’autogestion, la décentralisation, l’utilisation exclusive d’énergies renouvelables ou l’écoconception forment autant d’approches adoptées pour tendre vers un état d’équilibre entre l’humanité et l’environnement.

À l’instar du roman, l’exposition s’attache à mettre en scène d’autres manières de produire, de consommer, d’interagir entre espèces... en somme, d’habiter le monde. La question de l’adaptation face au dérèglement climatique, à l’épuisement des ressources naturelles et à l’effondrement de la biodiversité constitue le fil conducteur des réflexions. Les artistes ont ainsi édifié un havre de vie au cœur d’un champ, offrant la possibilité de mener une existence qui tend vers l’autosuffisance. Innovations technologiques à la fois durables, accessibles et utiles, les low- techs assurent la viabilité énergétique du lieu et des activités qui y sont pratiquées.


Le duo d’architectes, Frida Navratil et Levin Lehmann, a créé un abri léger pour individu en quête d’autonomie. La cellule, pensée comme un refuge, évoque la cabane habitée par Walden, décrite dans l’ouvrage éponyme de Henry David Thoreau en 1854. Pour ce faire, le duo a adopté une méthode que l’on pourrait dicter ainsi : « observer, collecter, réparer, assembler ». Il en résulte un collage architectural, une archive matérielle témoignant des rencontres avec les paysages locaux, avec les habitant(e)s et leurs histoires. Les œuvres multimédias de SK Andersen, pour leur part, sondent le concept d’effet papillon selon lequel la plus infime des actions, tel un battement d’ailes, pourrait avoir une portée aussi démesurée qu’inattendue sur le reste du monde. En superposant les sons d’une mégalopole tumultueuse aux images d’une chrysalide trouvée dans le champ, l’artiste met en tension des écosystèmes a priori radicalement différents et invite à considérer l’interconnexion entre ces milieux, l’influence réciproque qu’ils exercent. Grace Denis, quant à elle, présente une œuvre à déguster collectivement, confectionnée à partir de plantes locales glanées au fil de pérégrinations. Le repas est ici appréhendé comme un rituel structurant durant lequel se transmettent les savoirs concernant l’origine et la métamorphose des ingrédients, un moment durant lequel s’éprouvent des sensations gustatives, auditives, tactiles et visuelles. De son côté, Hugo Hectus a détourné les codes de communication habituels et les stratégies de marque pour réaliser une série d’outils de propagande — symboles, sculpture, affiches, signalétique, site web —, à l’effigie de l’exposition et des styles de vie alternatifs.

Les méthodes employées pour produire cette exposition convergent avec les modes d’existence invoqués. Pour cela, les artistes ont séjourné au sein de la résidence de recherche- création Aptus, nichée dans la commune de Brillac, durant des temps plus ou moins longs. L’organisation interne de cette résidence, préalablement définie par une constitution, exhortait les artistes ainsi que la commissaire d’exposition à repenser leur approche de travail. Inspirée notamment des travaux de Gunther Anders, d’Elinor Ostrom ou de Murray Bookchin, la constitution est composée de neuf articles, que voici : 

I. L’exposition ne peut avoir lieu dans une galerie, dans une institution ou dans un espace complice du système marchand, quand bien même l’exposition agirait comme une critique de ces lieux.
II. L’exposition doit être contextuelle au sens ou « elle ne doit pas être exclue de la réalité en tant qu’objet autonome de contemplation esthétique ».
III. Les artistes exposé(e)s collaborent avec les habitant(e)s du territoire au sein duquel l’exposition s’inscrit pour réaliser les œuvres.
IV. L’exposition ne peut inclure d’œuvres réalisées à partir de matériaux neufs — dans la limite du possible.
V. La chaîne de tout type de production faisant partie intégrante de l’exposition doit être traçable, documentée et rendue accessible.
VI. La décomposition des œuvres, la trace qu’elles laisseront sur terre doit être prise en compte dans leur conception.
VII. Quatre notions au cœur de la démarche de la réalisation des œuvres exposées : la démocratisation, l’autoproduction, la communalisation, la coopération.
VIII.Documentation et transparence : l’archive totale et accessible comme processus curatorial.
IX. L’exposition doit permettre de penser un autre modèle de société. Plus encore, elle doit permettre de l’expérimenter.

Certes, la constitution présente un éventail étendu de limites. Ne pourrait-on pas arguer que la restriction des lieux d’exposition constitue un frein à l’élargissement des publics ? Dans quelle mesure peut-on réellement se soustraire du système marchand ? Comment peut-on garantir une certaine équité dans le partage des ressources et des savoir-faire ? Est-il seulement possible d’assurer un traçage exhaustif de la chaîne de production ?

Si les obstacles jalonnent le chemin vers l’utopie décrite par Ernest Callenbach, force est de constater, néanmoins, que cette approche méthodologique invite à repenser les rouages de notre système. En cessant d’acheter du neuf, par exemple, les artistes arpentent les paysages en quête de matériaux. Et les petits riens — un fragment de ficelle, une coquille d’huitre, une fenêtre délaissée dans une décharge — se transmutent en trésors inestimables, regorgeant de potentiels insoupçonnés. Récupérant ce dont plus personne ne veut, iels se tournent aussi vers les voisin(e)s, parmi lesquel(le)s certain(e)s deviendront des ami(e)s. Considérer l’ensemble de la chaîne de production, c’est permettre sa représentation mentale pour en assumer ses impacts. Les artistes peuvent alors prendre soin de réguler les effets de leur production sur l’ensemble du vivant. La mise en commun des ressources ou encore la coopération a renforcé l’entraide, si bien que nombre des œuvres sont réalisées collectivement. Assurer une forme de transparence a permis d’accroitre le sens de l’éthique et de la responsabilité envers chacun(e)...

Finalement, plutôt que de considérer l’œuvre d’art comme un objet intouchable, fétichisé, l’exposition dévoile un lieu de vie tout à fait fonctionnel qui s’expérimente. Elle révèle un espace où les frontières entre les choses se dissolvent, où les systèmes prennent le relais, où les processus importent plus que les résultats.

De mars à juin 2022, j'ai rejoint l'équipe curatoriale d'Inland Campo Adentro à l'occasion de leur participation à la Documenta Fifteen (Cassel, Allemagne). Inland Campo Adentro revendique une approche décloisonnée où l'art et l'exposition sont traités comme des outils vecteurs de transformation sociale et écologique, des lieux qui repensent leur économie et leurs modes de production pour tendre vers une forme d'autonomie. Cette expérience a considérablement influencé le projet d'exposition, et c'est là que j'ai rencontré les artistes Grace Denis, Frida Navratil et Levin Lehmann.

L'œuvre "Le Jardin des Délices" du peintre néerlandais Jérôme Bosch, et plus particulièrement le panneau central du triptyque, constitue une référence qui imprègne l'imaginaire de l'exposition. Si certains considèrent qu'il représente la luxure et la débauche, un paradis trompeur où l'humanité serait entraînée dans la tentation et succomberait au péché, je ne suis pas de cet avis. Les êtres semblent vivre en harmonie les uns avec les autres et en parfaite adéquation avec leur environnement. Les constructions architecturales futuristes où les personnages se vautrent, les relations étonnantes qui semblent se nouer entre ces derniers et des créatures fantasmagoriques, ainsi que les activités récréatives joyeuses et farfelues qui sont pratiquées... forment un paysage utopique où de nouveaux agencements prennent corps entre l'humanité et le reste du monde.

Le roman raconte se déroule dans un avenir imaginaire où une région du nord-ouest des États-Unis se sépare pour former une nation écologique indépendante appelée Écotopia. On suit l'histoire à travers les yeux d'un journaliste américain chargé de découvrir et de rapporter sur cette nouvelle nation. Le livre explore les aspects politiques, sociaux et environnementaux de cette société alternative, offrant une réflexion sur les possibilités et les défis d'un mode de vie durable. En ce sens, il constitue une référence importante pour l'exposition.

Réflexions autour du nom de la résidence de recherche-création. Aptus signifie « fait pour » en latin, et trouve sa première occurrence au XIIIe siècle. Le terme constitue l’origine étymologique d’apte à, aptitude, adapter, adaptation...

Création de l'association Aptus, résidence de recherche-création, située sur la commune de Sarzeau, dans le golfe du Morbihan (Bretagne, France).

Sur le plan juridique, Aptus prend la forme d’une association loi 1901. Voici un extrait des statuts de l'exposition :
Article 1 : Il est fondé entre les soussignés et toutes les personnes physiques qui adhéreront aux présents statuts une association dénommée APTUS.
Article 2 : La présente association a pour objet la mise à disposition d’une résidence pour la création artistique en lien avec l’écologie du territoire. La résidence, qui inclut un lieu de vie et des ateliers, doit permettre la conception et la production de projets artistiques comportant un ancrage territorial et environnemental. Une restitution des productions artistiques se fait à la fin du temps de résidence, à travers une exposition ouverte aux publics.
Article 3 : Pour atteindre ces objectifs :
— L’association accompagne les artistes dans leur travail et met à disposition un lieu de vie ainsi que des ateliers pour travailler.
— L’association coordonne des rencontres avec des professionnel(le)s du territoire (exemple : le Low-Tech Lab).
— L'association favorise la restitution publique à travers l’organisation d’une exposition gratuitement accessible.

Carte de la Pointe de l'Ours, Brillac.

Mail type envoyé à plus d'une vingtaine d'interlocuteur(ice)s, principalement des acteurs des collectivités territoriales (Mairie de Sarzeau, DRAC Bretagne, FRAC Bretagne, Réseau ACB, Low Tech Lab, P'art Belle, l’Hermine, Domaine de Kerguéhennec...) dans le but d'intégrer le réseau local, mais aussi d'être soutenu techniquement et/ou financièrement. Un sentiment d'espoir accompagnait cette démarche, qui, le plus souvent, se révélait décevante.

Visite du Low-Tech Lab, situé à Concarneau et partenaire de l'exposition.

Visite du domaine de Kerminy, résidence pour les artistes, chercheurs, agriculteurs située sur la commune de Rosporden, à proximité de Concarneau. On y trouve plusieurs serres, potagers, moutons… de nombreuses chambres et ateliers. Le lieu, extrêmement inspirant, tend vers une forme d’autonomie.

Malgré le budget extrêmement restreint alloué à l'exposition, tous les membres du projet bénéficient d'une rémunération identique pour leur année de travail. Une gestion équilibrée est nécessaire pour faire face à cette contrainte budgétaire. Les artistes et la commissaire d'exposition exercercent chacun(e) un travail alimentaire afin de poursuivre leur pratique artistique.

Calendrier des opérations sur l'année.

26 élèves d'une classe Ce1-Ce2 de l'école Marie Le Franc viennent réaliser un atelier sur le thème de la création écologique. Le fil conducteur de leur année a été la lecture du livre "la naissance du monde" de Bertrand Fichou et Marie-Agnès Gaudrat, qui raconte la naissance et l’évolution du monde en 100 épisodes. Les 100ème épisode est une conclusion qui explique aux enfants que l'avenir de la Terre est entre nos mains et que chacun à son rôle à jouer. Cette sortie scolaire sera l'occasion de conclure ce travail mené au cours de l'année.

Intervessel, l'œuvre de l'artiste SK Andersen, est une exploration sensorielle et contemplative, qui invite à un renversement de regard et de l'écoute. Le corps du visiteur allongé, faisant face à l'œuvre suspendue dans les airs, incite à une observation attentive. Cette immersion permet à l'individu de se décentrer et d'adopter une perspective différente. Des bruits de la ville distordus se superposent à une vidéo mettant en scène un cocon de papillon de nuit filmé dans le champ. Si, de prime abord, ces univers peuvent sembler totalement dissonants, l'œuvre amène à réfléchir à leur interconnexion. Elle évoque l'effet papillon, un concept selon lequel un changement qui semble minuscule peut avoir des conséquences importantes dans le monde, souvent difficiles à imaginer.

Lorsque j'ai commencé le travail de recherche, je me suis d'abord intéressé aux lichens. Ces êtres complexes sont formés d'une symbiose entre des algues, des champignons et souvent d'autres organismes, leur existance se repose entièrement sur l'interdépendance de ses composantes. Ils se développent dans des milieux très pollués autant que dans des zones protégées. Le lichen est présent dans l'installation poussant sur un plaque de verre, et fonctionnent comme un lien entre differents environnements de vie. Le lichen répresentes aussi un eschelle temporel hors de l'humain, comme les lichen pouvent vivre plus que 5000 ans. Cet aspect a influencé mon approche de la composition sonore.

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Il y a beaucoup des ronces sur le champs, et au début du projet j'ai fait de la recherche sur leur propriétes et particulierement sur la question de leur caratère invahissante. Les ronces, une espèce végétale largement répandue dans le champ et ses environs, suscitent des opinions divergentes quant à sa nature invasive. Certains humains considèrent cette plante comme envahissante, tandis que d'autres espèces trouvent des avantages dans sa présence, car elle crée des habitats propices à leur survie. Bien que les ronces ne soient pas directement représentées dans l'œuvre, la question des espaces de vie dédiés aux activités humaines par rapport à ceux occupés par les non-humains est essentielle. Cela soulève des réflexions sur les différentes perceptions et les interactions entre les êtres vivants dans leur environnement commun. SK.A.

Alors que je jardinais dans le champ, j'ai découvert un cocon posé sur la terre. Il dégageait une présence fascinante et vulnérable avec ses teintes rouges foncées et reflets bleus et violets. Délicatement, je l'ai pris entre mes mains. Il m'a fait pensé à un vaisseau spatial, ou un outil technologique dont l'usage serait opaque. Ses ailes semblaient imprimés sur sa surface. Immobile tel un objet, il était pourtant empreint de vie. Je me suis interrogé sur la système qui à façonné son existence et ma propre présence au sein de ce système. Je l'ai documenté en le filmant à l'aide de mon iPhone. SK.A.

Pour identifier l'espèce de cocon, j'ai utilisé l'application iNaturalist. iNaturalist est à la fois un projet de science participative et un réseau social en ligne dédié aux naturalistes, aux citoyens scientifiques et aux biologistes. Il repose sur le principe de cartographie et de partage des observations de la biodiversité à travers le globe. J'ai déposé une photographie sur l'application et plusieurs utilisateurs ont identifié l'insecte. Le cocon appartient à la famille des Sphingidae. SK.A.

Pour créer la composition sonore, des enregistrements de sons urbains ont été capturés et transformés à l'aide du logiciel Ableton Live 11. Parmi ces sons, on retrouve des éléments tels que le souffle, métro, le train, les sirènes d'ambulance, les alarmes de sécurité, les sonneries de téléphone, ainsi que des manifestations de l'activité humaine et des plaintes érotiques, les battement d'ailes d'un papillon, les bruits de verres cassés entre autres. Ces bruits ont été enregistrés au fil des années, et ce travail de composition a duré plusieurs semaines. SK.A.

Je me suis procuré cet iPad sur Leboncoin il y a quelques années. Je ne m'en servais plus depuis longtemps. La vitre brisée m'intéressait parce qu'elle révèle la matérialité de l'objet. Je souhaitais mettre en évidence l'obsolescence de ce type de produit, ainsi que son caractère éphémère. SK.A.

Cette enceinte, trouvée lors d'un marché aux puces, assure la diffusion du son de l'œuvre. SK.A.

Frida Navratil a trouvé des morceaux de vitre recouverts de lichens dans une décharge avoisinant le champ. La vitre sert de support à l'iPad qui diffuse la vidéo. SK.A.

J'ai trouvé une boîte qui contenait une multitude de vieilles cordes, certaines de bateaux, plus ou moins usagées. J'en ai utilisées pour suspendre l'installation au plafond. SK.A.

L'iPad et l'enceinte sont alimentées en énergie grâce au panneau solaire. Ce dernier est gracieusement prêté par le Low-Tech Lab, partenaire de l'exposition, localisé à Concarneau. L'implémentation de cette technologie au sein de l'installation a été réalisée avec l'aide précieuse de Lou et Guilwen, deux étudiant(e)s de l'École Centrale de Nantes. Peu de temps après leur départ, le convertisseur grilla, nous obligeant à solliciter l'aide de Jean-Jacques, un ami compétent et spécialiste des systèmes énergétiques, afin de résoudre cette problématique. Malheureusement, nous avons été contraints de commander des pièces en urgence sur Amazon Prime pour compléter l'installation. SK.A.

La double affiche, réalisée par Hugo Hectus, est pensée comme un outil de propagande. La pièce de monnaie est le symbole du système économique par excellence, elle incarne l'échange, la richesse et l'héritage. Le symbole est ici détourné, intégrant un arbre majestueux — le même qui trône au centre du champ où se trouve l'exposition — autour duquel une communauté est rassemblée. La scène présente la biodiversité et la collectivité comme des trésors à chérir, à cultiver et à transmettre. L'artiste, qui a collaboré avec OpenAI pour réaliser la pièce, s'est inspiré de la florette, une monnaie bretonne frappée à Vannes au XVème siècle.

Le cocoon, conçu par Grace Denis, Frida Navratil et Levin Lehmann, est une œuvre qui fusionne les formes des serres et des cocons. Cet espace collectif est un lieu de vie où les humain(e)s, les plantes et les insectes cohabitent.

Ces tiges métalliques ont été récupérés chez un voisin ostréiculteur. En raison de leur importante corrosion, elles ont pu être facilement manipulées pour former des courbes élégantes sur lesquelles suspendre le filet. G.D.

Le tissu, initialement destiné à la protection des cultures, a été généreusement donné par un voisin. Les déchirures ont été soigneusement réparées et transformées en fenêtres. G.D.

Grace Denis propose une performance gustative qui se présente comme un moment de convivialité partagé avec le public, résultant de son observation de la lente fluctuation du paysage tout au long du printemps. Elle a adopté une relation éphémère avec certaines plantes, créant une archive comestible du paysage, explorant la possibilité de se rassasier de la verdure environnante. Le menu est organisé par espèce, mêlant l'invasif, le cultivé et l'indigène, dans une analyse critique de ce qui vient du territoire et de ce qui est arrivé par le biais de la globalisation. Le repas n'est pas destiné à être ingéré de manière séquentielle (entrée, plat, dessert) mais appréhendé comme un modèle de pâturage.

La mineuse désigne le stade larvaire de nombreux insectes tels que les papillons de nuit, les mouches à scie et les coléoptères. Ces larves s'enfoncent dans les tissus foliaires des plantes, créant des tunnels visibles qui se manifestent souvent sous la forme de traînées blanches en spirale à la surface des feuilles. À petite échelle, les mineuses sont relativement inoffensives, mais ces herbivores endophages altèrent la chlorophylle des feuilles, perturbant ainsi la photosynthèse, et peuvent finalement entraver la croissance des plantes en cas de présence généralisée. G.D.

La salicorne est un genre de plantes succulentes et halophytes. Elles poussent principalement le long des marais salants, sur les plages et parmi les mangroves. Ces plantes ont la particularité d'accumuler le sel dans leurs feuilles et leurs tiges, ce qui leur permet de s'adapter aux habitats salins. Les salicornes, qui appartiennent au genre Salicornia, regroupent différentes espèces de plantes halophytes. Autrefois, les cendres de ces plantes séchées et brûlées étaient utilisées dans le processus de fabrication du verre comme source de carbonate de sodium. Dans la région du golfe du Morbihan, c'est la salicorne appelée « passe-pierre » qui a été récoltée, son nom étant en référence à Saint Pierre, le saint patron des pêcheurs. Actuellement, des recherches sont menées dans la région côtière de Sonora, au Mexique, pour étudier le potentiel de la salicorne en tant que source de biomasse et d'alimentation. G.D.

Le Foeniculum vulgare est une plante vivace, dressée et ramifiée, souvent considérée comme une mauvaise herbe nuisible. Elle prospère dans les zones perturbées et se rencontre fréquemment au bord des routes. Ce cousin sauvage du fenouil cultivé offre le même goût et les mêmes utilisations culinaires. Ressemblant à l'asperge mature, il se distingue par ses frondes aux fleurs dorées. Il fait partie de la famille des Apiacées, qui inclut également le céleri, la carotte, le persil et la livèche. G.D.

Ce hydromel de lilas capture le parfum éphémère du syringa vulgaris, cueilli le premier mai sur le chemin sinueux qui mène à la maison, coïncidant ainsi avec l'anniversaire du décès de ma grand-mère. Sa couleur préférée était le violet, elle s'habillait souvent de cette couleur et aimait les fleurs de lilas. Les fleurs ont été infusées dans un élixir bouillant de miel et d'eau avant la fermentation. Cet annonciateur du printemps, une plante à fleurs de la famille des Oleaceae, peut vivre jusqu'à cent ans et est considéré comme le symbole de l'"amour ancien". Les fleurs de lilas contiennent un composé naturel appelé indole, que l'on retrouve dans les fleurs et les excréments. Sa note de fond dans le parfum évoque la promesse du printemps, faisant allusion aux souvenirs hivernaux de décomposition et de désolation. G.D.

Les figues, classées botaniquement sous le nom de Ficus caria, poussent sur un arbre à feuilles caduques faisant partie de la famille des Moraceae. S'épanouissant dans les climats chauds, la figue est considérée comme l'un des premiers fruits cultivés, utilisé à la fois comme aliment et à des fins médicinales. Ses feuilles ont été utilisées depuis l'Antiquité dans de nombreuses applications et sont également un symbole de modestie. Son fruit est un syconium, un type de fruit multiple, qui possède un passage étroit, un ostiole, permettant à la guêpe spécialisée de la figue, blastophaga psenes, de polliniser les fleurs. L'utilisation de la sève de l'arbre à figues comme forme de présure dans la fabrication du fromage remonte à la Grèce antique, où il est évoqué dans l'Iliade. G.D.

Le site web (www.aptus.bzh) fonctionne comme une plateforme où les artistes et la commissaire de l'exposition peuvent documenter et rendre visible le processus de création et de production du projet. C'est une archive qui restitue l'histoire des œuvres, l'origine des matériaux, leur transformation, les rencontres, les échanges, mais aussi les références, les tests et les déconvenues. Contrairement aux cartels conventionnels qui accompagnent habituellement les œuvres d'une exposition et qui fournissent finalement peu d'informations sur le procédé de fabrication - occultant par exemple la participation d'assistant(e)s ou l'achat de matériaux toxiques produits dans des conditions de travail dégradantes - ce système invite chacun(e) à assurer une certaine transparence quant à son approche.

Cette table, créée par Grace Denis, Frida Navratil et Levin Lehmann réunit des éléments issus de la culture des huîtres. Elle explore, de manière spéculative, les manières d'utiliser les restes de la production alimentaire. Les convives se rassemblent autour de la table, évoquant ainsi le regroupement des huîtres sur les surfaces de l'armature. Cette œuvre cherche à transformer la table en quelque chose de plus qu'une simple surface pour poser des objets, en lui conférant le potentiel d'être elle-même une assiette. Des coquilles intégrées à la surface permettent d'y placer des matériaux comestibles, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives créatives.

Cette pièce en biomatériaux, composée de fibres de lin et de chanvre, a été découverte lors de notre visite préliminaire au Low Tech Lab de Concarneau. C'est devenu un objet catalyseur de la réflexion sur la production de biomatériaux dans la région. G.D.

Cet extrait de mon carnet détaille la planification de la construction de la table, esquissée lors d'un repas à la Cabane a Milo au cours duquel nous avons discuté des différentes possibilités de fabrication autour d'huîtres et de cidre. G.D.

Ces bivalves sont très présents dans le golfe du Morbihan. Les coquilles ont été récupérées à proximité du vivier "La Cabane à Milo" puis intégrées à la construction de la table. Les coquilles elles-mêmes renferment de nombreux composants utilisés dans les industries alimentaire, pharmaceutique et médicale. En tant que matière comestible, l'huître offre des protéines, du zinc et divers éléments bioactifs. Pour la conception de la table, nous avons intentionnellement dévié d'une surface plane traditionnelle afin de transformer la table en assiette. Différentes formes de coquilles ont été incrustées afin d'accueillir les aliments directement à l'intérieur.

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Vers la pointe de l'Ours, dans un coin que je ne connaissais pas encore et orienté vers l'ouest, nous avons récupéré une série d'armatures métalliques qui étaient autrefois utilisées pour la culture d'huîtres. Ces structures étaient devenues obsolètes pour l'ostréiculteur, probablement en raison de leur corrosion. Ce dernier a été légèrement surpris par notre intérêt pour ces amas de métal délabrés et nous a confié que notre collecte allégeait son travail, lui qui devait s'en débarrasser. Une sensation d'échange mutuel s'est installée lors de notre brève conversation. Nous avons quitté sa propriété en transportant ces structures rouillées, autrefois rigides et droites. Nous nous sommes faufilés entre les espaces vides de l'armature, exécutant une sorte de chorégraphie harmonieuse, suivant le sentier côtier jusqu'à la voiture. Nous avons effectué quatre ou cinq allers-retours. En chemin, un amas de roches et d'algues accroché à la structure est tombé devant nous. G.D.

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Le sable ramassé sur les plages locales du golfe a été utilisé dans la production de la table afin de renforcer la résistance du matériau et d'ajouter une texture à la table, comme hommage aux habitats locaux. G.D.

Après plusieurs d'entatives infructueuses pour réaliser la base servant d'assiettes avec des matériaux comme de l'agar agar et alginate , il a fallu ajouter une petite quantité de ciment pour consolider l'ensemble. G.D.

Le four solaire utilise des miroirs réfléchissants pour concentrer la lumière du soleil sur un point focal, générant ainsi une chaleur intense qui peut être utilisée pour cuire des aliments. Il est fabriqué à partir de matériaux de récupération. Des tutoriels sont disponibles en ligne sur le site du Low-Tech Lab. Celui-ci a été réalisé par le Low-Tech Lab. Lou et Guilwen, étudiant(e)s de l'École Centrale de Nantes, qui ont séjourné un temps au sein de la résidence Aptus, l'ont perfectionné.

Pour réaliser la cabane, Frida Navratil et Levin Lehmann ont passé plusieurs mois sur la commune de Sarzeau afin de s'imprégner du territoire, de la culture locale et des paysages. Les rencontres avec les habitants et les matériaux ont influencé la forme finale de l'œuvre. En effet, ils n'avaient pas d'idée préconçue du projet architectural qu'ils souhaitaient élaborer. Chaque trouvaille, qu'il s'agisse de poches à huîtres et d'accessoires d'ostréiculteurs usagés, d'une fenêtre provenant d'une caravane abandonnée ou de tuiles d'ardoise offertes par des voisins désireux de s'en débarrasser, a contribué à l'émergence de la forme finale. Le processus de création, qui implique de prendre son temps et de rencontrer les gens, prime sur le résultat final de l'œuvre. L'habitation est équipée d'un système de récupération d'eau de pluie et alimentée en énergie solaire, ce qui invite à un mode de vie simple et autonome. Elle abrite également l'installation multimédia de l'artiste SK Andersen.

Trouvé dans le jardin d'une caravane abandonnée à Brillac.

Par une journée humide et brumeuse au début de l'hiver, les pierres reposaient lourdement dans la terre humide. Envahies par la végétation, entaillées, endurantes. Les pierres ont été les premiers objets lourds que nous avons transportés sur le terrain. F.N.

Trouvés sur la plage de la Pointe de l'Ours à Brillac. Des seaux lourds remplis de sable. Six pauses en cours de route, des marques de pression sur les mains. F.N.

Trouvé dans le jardin d'une maison privée à Brillac.

Le seul bouleau que nous ayons vu dans la région. L'écorce est utilisée pour protéger le bois de construction de l'humidité, une technique de construction traditionnelle que nous avons apprise à la campagne en Suède. F.N.

Trouvées sur le bord du champ.

Les pierres reposent, alignées dans les murets, usées et façonnées par le temps. Leur tâche de séparer les parcelles de terre n'est plus à accomplir. F.N.

Trouvé dans l'atelier de la résidence. Tension. Force. Rotation. Pression. Un outil rouillé qui a rempli sa fonction de maintien. F.N.

Trouvé à l'extérieur de l'atelier du charpentier Philippe à Surzur.
Treize poutres utilisées pour la construction en cours. Dix-neuf poutres utilisées pour les murs. Onze poutres utilisées pour le toit. Joie, rencontre, début. Un matériau d'occasion avec différentes histoires. Des clous rouillés qui traversent le bois. F.N.

Trouvé à l'extérieur de l'atelier du charpentier Philippe à Surzur.

De l'acier rouillé, plié par le temps. Redressé et affûté pour les préparer à être réutilisés. F.N.

Trouvé dans une caravane abandonnée à Brillac.

Délicatement retiré de son contexte initial, nous lui donnons une nouvelle vie. F.N.

Trouvé dans l'ancienne maison à côté du Bar Cliffdon sur la commune de Brillac.

Un amas de matériaux et d'objets. Elle est très lourde. Nous la transportons à trois jusqu'au champ. F.N.

Découvert dans la vieille maison adjacente au Bar Cliffdon à Brillac.

À la fois audacieux et précautionneux, nous nous aventurons dans la charpente du toit de la maison, cherchant à maintenir notre équilibre. Le plafond est dépourvu de tout revêtement, laissant la pluie s'infiltrer en douces gouttes à l'intérieur. Nous y découvrons les planches de bois inutilisées, soigneusement agrafées et attendant patiemment leur destinée. Avec précaution, nous les détachons une par une, conscient de la valeur qu'elles renferment. F.N.

Trouvé sur le toit de la vieille maison voisine du bar Cliffdon à Brillac.

C'était une journée printanière pluvieuse, où nos vêtements étaient trempés mais les rencontres étaient chaleureuses. Une chaîne de personnes s'entraidant pour retirer délicatement les tuiles du toit et les charger avec précaution sur la remorque. F.N.

Trouvé dans une boîte à l'extérieur de l'atelier de couvreur de Ludovico.

Des centaines de clous accrochés les uns aux autres. Un par un, nous les trions par taille. Du sang sur les doigts. L'odeur d'urine. Des rires à cause de maladresse. F.N.

Trouvé à l'extérieur de l'atelier Kerlann Marine à Surzur.

Un paysage de bouées usagées reposant sur le sol. Différents matériaux, couleurs et marques. Nous n'avons jamais rencontré Kerlann et avons laissé une note à la place avec notre numéro de téléphone. F.N.

Trouvé dans l'atelier de la résidence.

Un mélange de tubes entremêlés les uns aux autres. Robert, l'ancien propriétaire de la maison, avait tout trié. Reconnaissance d'avoir pu suivre ses traces et utiliser ses restes. F.N.

Découvert dans l'atelier de la résidence.

Un vieux four rouillé, semblant être une figure distinctive prête à s'échapper à tout moment. Des fissures le long des côtés, et après plusieurs tentatives, nous réalisons qu'il est irréparable. F.N.

Découvert dans l'atelier de la résidence. F.N.

Découverts dans une caravane abandonnée à Brillac.

Sa couleur jaune et sa forme gonflée lui confèrent un aspect rétro. Après plusieurs tentatives de déconstruction, nous parvenons enfin à la transporter jusqu'au champ. F.N.

Offert par Ludovic dans son atelier de couvreur à Surzur.

Nous nous trouvons face à un dilemme lors de l'utilisation de ce matériau moderne et inhabituel. Finalement, nous décidons de suivre les conseils de Ludovic et d'installer délicatement le film sur le toit, afin de le protéger des intempéries et des éléments naturels. F.N.

Acheté chez Mr. Bricollage. F.N.

Acheté chez Mr. Bricollage. F.N.

Découvert dans le jardin d'une caravane abandonnée à Brillac.

Appuyé sur deux blocs de béton, une grande fissure au milieu. F.N.

On les trouve dans les parcs à huîtres autour de la résidence.

D'immenses montagnes de filets, soigneusement agrafés et entreposés. Ces filets sont généralement utilisés pour maintenir les huîtres sur les tables, leur permettant de se développer jusqu'à atteindre la taille idéale. Les ostréiculteurs voisins nous offrent généreusement ceux qui ne sont plus utilisés. F.N.

Acquis à la champignonnière Brezh Bell à Brest.

Un groupe de jeunes enthousiastes animés par le désir de révéler le plein potentiel des champignons. Dans la tradition des guérisseurs chinois, le champignon de l'immortalité est vénéré pour ses propriétés anti-âge remarquables, en faisant un talisman prisé pour la chance, la guérison et le bien-être. F.N.

Empruntée à un ami d'Allemagne.

Notre chère amie Nicole est venue nous rendre visite à Brillac et, juste avant de venir, elle a trouvé cette horloge sur un marché aux puces à Bruxelles. Émerveillés par son système sans pile, nous l'avons empruntée pour l'exposition. Elle fonctionne en utilisant la conductivité électrique créée par la solution d'eau salée. F.N.